Sienne

« Vous ne sauriez pas dire mon âge, même si vous étiez devin. » La femme fit passer sa tresse du côté gauche de son cou, mais la table m’empêchait de voir le bout du serpent grisâtre.

Je vis d’abord sa tresse. C’était cela le plus étrange : on aurait dit que la tresse devançait la femme. C’est seulement plus tard que je remarquais son regard creux et ses mains. C’était surtout le mot suavité qui la précédait. À sa tresse, je ne parvins pas même à donner une mesure approximative. Longue, à moitié enroulée, elle paraissait vivante. De couleur grise – mais agitée, irrégulière. Un serpent éveillé. – Même si vous étiez devin… La femme s’assit. Elle répéta la phrase dans deux autres langues. Elle lut dans mon regard que je comprenais l’espagnol. Elle demanda d’où je venais. Je répondis « caluanda (1) » pour brouiller les pistes. Mais elle répéta la phrase dans un portugais parfait : – Vous ne sauriez pas dire mon âge, même si vous étiez devin. Elle fit passer sa tresse du côté gauche de son cou, mais la table m’empêchait de voir le bout du serpent grisâtre. Des petits objets métalliques et autres verroteries ornaient le corps de la tresse. – Je n’essaierai jamais de deviner votre âge. Je connais mes limites dans l’...

ARTICLE ISSU DU N°50

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