Shakespeare, lecteur de Montaigne
Publié dans le magazine Books n° 64, avril 2015.
Le dramaturge a beaucoup emprunté au Français, qu’il lisait dans la belle traduction de Florio. Mais entre le fils de gantier et le noble bordelais, il y a un monde.
Nietzsche considérait Shakespeare comme « le meilleur lecteur de Montaigne ». De Voltaire, qui l’appelait « le Corneille anglais », à Ariane Mnouchkine, qui vient de traduire et de produire un époustouflant Macbeth, l’ombre portée de Shakespeare plane sur le théâtre français. Certains, comme Chateaubriand (Essai sur la littérature anglaise), s’en sont d’ailleurs agacés. Dommage qu’ils n’aient pu, pour se consoler, mieux mesurer la dette du dramaturge anglais envers notre Montaigne national.
Shakespeare – qui savait pourtant le français – a en effet connu Les Essais par l’entremise de John Florio, l’un des plus illustres traducteurs de l’Histoire, crédité d’avoir anglicisé Montaigne et même de l’avoir amplifié. Les Essais de Florio étaient « constamment à l’esprit de Shakespeare, sinon sur sa table », écrit Stephen Greenblatt, à l’origine de ce florilège d’extraits susceptibles...