Qui gouverne l’Iran ?
Publié dans le magazine Books n° 3, mars 2009. Par Ervand Abrahamian.
Quoi qu’on en dise, le président Ahmadinejad n’est pas maître du jeu à Téhéran. Mi-théocratie, mi-démocratie, la République islamique est un régime indéfinissable, d’abord dominé par ses luttes internes.
Les dirigeants américains collent à l’Iran quantité d’étiquettes, le qualifiant – sans la moindre ironie – de militariste, d’agressif, d’expansionniste, d’interventionniste, voire d’hégémonique et impérialiste. Les médias leur font souvent écho, représentant le pays comme un métis de l’Empire perse et du IIIe Reich, avide de rétablir la Pax iranica dans la région. Les néoconservateurs vont plus loin encore, prétendant que l’Iran a « déclaré la guerre » aux États-Unis en 1979 ; que les deux pays sont engagés dans une lutte « à la vie à la mort » ; qu’il s’agit de la Quatrième Guerre mondiale (la troisième étant la guerre froide) ; et que le président Mahmoud Ahmadinejad est à la tête d’un mouvement islamo-fasciste visant à recréer le califat des premiers temps de l’Islam.
Voilà qui nécessite d’être sérieusement confronté à la réalité. L’Iran consacre 6 milliards de dollars par an à sa défense : la Turquie et Israël dépensent chacun plus de 10 milliards, l’Arabie Saoudite 21 milliards ; et l’Iran est battu à plate couture par les émirats du Golfe, ces stations-service...