Publié dans le magazine Books n° 87, janvier/février 2018. Par Baptiste Touverey.
C’est une évolution inquiétante. Contrairement à ce qui s’est passé lors des révolutions industrielles précédentes, la machine numérique prend souvent en charge tout ou partie du travail intellectuel. L’automatisation a tendance à fortement réduire nos capacités d’action et de réflexion.
Le blogueur et essayiste américain Nicholas Carr est l’un des plus importants (et virulents) critiques du numérique. En juillet 2008, il a publié dans The Atlantic un long article qui a fait grand bruit : « Google nous rend-il stupides ? » L’article est devenu un livre, Internet rend-il bête (Robert Laffont, 2011). D’autres ouvrages sur Internet ont suivi.
L’automatisation a atteint un niveau de perfectionnement dont nous n’aurions pas osé rêver il y a encore quelques années. Comment l’expliquez-vous ?
Par une série de progrès simultanés dans des domaines cruciaux : d’abord ce qu’on appelle la « perception par machine » – les divers systèmes sensoriels comme le radar, le laser et la cartographie numérique, qui permettent aux robots de se déplacer dans le monde réel ; ensuite le traitement automatique du langage naturel, grâce auquel les ordinateurs peuvent interpréter des questions et des instructions écrites ou parlées. Il y a aussi les moteurs de recherche, qui extraient très rapidement une information pertinente d’énormes bases de données. Mentionnons, enfin, l’apprentissage automatique,...