Publié dans le magazine Books n° 13, mai-juin 2010.
Loin d’être un régime totalitaire, l’Iran est aux mains d’une clique millénariste de plus en plus isolée, dont le seul soutien est le système de prébendes accordé aux Gardiens de la révolution. Or le pays est au bord de la faillite. Mais l’opposition n’est pas particulièrement attachée aux idéaux démocratiques. L’idéologie primordiale restant le nationalisme, il est concevable qu’un officier sorte du rang et prenne le pouvoir.
Ali Ansari est professeur d’histoire iranienne et directeur de l’Institut d’études iraniennes de l’université de Saint Andrews, en Écosse. Il est également chercheur associé au Royal Institute for International Affairs de Londres. Il est l’auteur de nombreux livres sur l’Iran, considérés comme des ouvrages de référence, notamment : Islam and Democracy. Aucun n’est traduit en français.
Depuis la réélection très contestée de Mahmoud Ahmadinejad, en juin 2009, l’Iran traverse une crise politique majeure. Comment analysez-vous la nature de l’affrontement en cours ?
C’est le fruit d’un rétrécissement catastrophique de la base du pouvoir. Depuis la révolution, la République islamique se revendique d’une double légitimité : la légitimité théocratique, qui s’incarne dans la figure du Guide suprême, l’ayatollah Khamenei ; et la légitimité démocratique, qui s’incarne dans le principe du choix populaire des gouvernants. Ce système dual fait que la République islamique est gouvernée de manière relativement pluraliste, au gré d’un subtil jeu d’équilibre entre...