« L’enseignement dans les universités ? Du travail d’amateur »
Publié dans le magazine Books n° 118, mars-avril.
La recherche universitaire obéit à des critères d’évaluation précis. Pourquoi n’est-ce pas le cas de l’enseignement ? Pourquoi celui-ci reste-t-il le parent pauvre du système éducatif supérieur ? C’est là le résultat d’une longue histoire, bien sûr, mais pas seulement : le manque de volonté politique se fait sentir.
Vous venez de consacrer un ouvrage à l’histoire de l’enseignement dans les universités américaines. Comment jugez-vous la performance actuelle de cet enseignement ? Est-il globalement de bon niveau ?
Vous voulez une réponse honnête ? Triste et honnête ? Nous n’en savons rien. Le système est conçu de telle sorte qu’il est presque impossible de répondre à votre question. Quiconque fait des généralisations se trompe nécessairement. D’abord, il y a un nombre colossal d’universités aux États-Unis – plus que nulle part ailleurs. Leurs tailles et leurs objectifs sont très différents. On compte plus de 4 000 institutions où l’on peut obtenir un bachelor of arts, l’équivalent d’une licence. À titre de comparaison, en Grande-Bretagne on en recense 50 seulement (et, en France, un peu plus de 70). Surtout, il n’existe rien qui permette d’évaluer l’enseignement de manière professionnelle, comme nous évaluons la recherche. C’est un paradoxe : l’enseignement universitaire est un acte éminemment public qui est resté essentiellement privé. Des millions...