Le siècle de la jalousie
Publié le 10 novembre 2017. Par La rédaction de Books.
Dans le dernier film des frères Foenkinos, sorti cette semaine sur les écrans, Karin Viard est Jalouse.
Une émotion dont il est particulièrement difficile de parler tant elle est socialement mal vue, assure Peter Toohey, professeur de lettres classiques à l’université de Calgary.
Dans son dernier livre Jealousy, il rappelle qu’elle est difficile à différencier de l’envie. « L’envie concerne ce que vous voudriez avoir mais ne possédez pas, tandis que la jalousie se rapporte à ce que vous avez et redoutez de perdre », écrit-il. La jalousie amoureuse est, selon lui, profondément naturelle. Certaines cultures seraient cependant plus enclines à l’éprouver ou à en faire la démonstration.
Ainsi « en Europe, on assiste à une explosion des représentations de la jalousie dans la culture les dernières décennies du XIXe siècle », précise Toohey. Des personnages excessivement jaloux émaillent la littérature et la musique de cette époque, de Pozdnychev dans La Sonate à Kreutzer de Tolstoï, à Bradley Headstone de L’Ami Commun de Dickens en passant par La Cousine Bette de Balzac et l’essentiel de l’œuvre de Verdi. La peinture et la sculpture développent également toute une iconographie relative à cette émotion faite de maris écoutant aux portes ou plus symboliquement d’oreilles, de jaune ou de chats. A l’approche du XXe siècle, des artistes comme Edvard Munch ou August Strindberg ont essayé de trouver des moyens d’exprimer le ressenti des jaloux.
Cette soudaine passion pour la jalousie est liée à l’idéal bourgeois de l’amour romantique. Quand le mariage est considéré comme un accomplissement personnel peut se développer un sens de l’exclusivité qui va au-delà du fait de déclarer posséder une autre personne, note Toohey.
A lire dans Books : M et Mme Tolstoï, couple infernal, mai 2009.