Kipling dans la jungle américaine
Publié le 3 septembre 2019. Par Pauline Toulet.
Plus de quatre-vingts ans après sa mort en 1936, le célèbre écrivain Rudyard Kipling n’est plus en odeur de sainteté. Premier auteur de langue anglaise à recevoir le prix Nobel de littérature, on l’a plus tard « taxé de colonialiste, de chauvin, de raciste, d’antisémite, de misogyne, d’impérialiste va-t-en-guerre. Et, dans une certaine mesure, il l’était » relève Charles McGrath dans The New Yorker. La mauvaise réputation de l’auteur du Livre de la jungle n’a pas rebuté Christopher Benfey, spécialiste de la littérature américaine du XIXe et du XXe siècles, qui vient de lui consacrer un ouvrage. Dans If, il se penche sur une période peu connue de la vie de Kipling : les quatre années qu’il a vécues aux États-Unis.
Kipling en Amérique
Déjà célèbre grâce à ses poèmes et ses contes sur l’Inde, l’écrivain britannique épouse en 1891 Carrie Balestier, une Américaine qui se trouve être la sœur de son agent littéraire. Le couple achète alors cinq hectares de terres à Brattleboro, dans le Vermont, et s’installe dans une maison construite des mains de Kipling. C’est là-bas qu’il écrivit Le livre de la jungle, Capitaines courageux et la première mouture de Kim. « Si Kipling voyait d’un bon œil les États-Unis – son ouverture et sa liberté, l’absence apparente de castes et de classes – il appréciait beaucoup moins les Américains. Il les trouvait rustres, bruyants, beaucoup trop portés sur l’alcool et dangereusement enclins à la violence », poursuit Charles McGrath. C’est ce sentiment de vivre dans une jungle dépourvue de lois qui aurait inspiré à Kipling la trame de son célèbre roman, soutient Benfey.
Du Vermont à la jungle
En s’installant dans le Vermont, Kipling a déclaré que lui seul était en mesure d’écrire le grand roman américain. On peut douter de la réalisation de cette prophétie, toutefois, « Kipling a eu une influence durable sur la culture américaine », affirme The Economist. « Il a popularisé des thèmes tels que les vertus de l’éducation dans la nature sauvage qui ont irrigué la littérature américaine de son époque ».
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