Proust : Dis-moi comment tu lis…
Publié dans le magazine Books n° 40, février 2013.
Presque tous les personnages de la Recherche ont un livre à la main. Et ce qu’ils lisent, et la façon dont ils lisent, en dit long à leur propos. Très long.
« Rares sont les écrivains qui n’aient pas été aussi de grands lecteurs », écrit Anka Muhlstein. Exact – mais aucun n’entremêle comme Proust la littérature, la lecture et la vie : « La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue, c’est la littérature (1). »
Bien sûr, c’est d’abord une affaire d’enfance : asthmatique, insomniaque, fils à maman, le petit Proust lisait comme un forcené. C’était presque son unique plaisir – un plaisir douloureux, qui lui tirait des flots de larmes ; un peu trouble aussi : le livre que lui lisait tendrement sa mère, n’était-ce pas l’incestueux François le Champi, où le héros finit par épouser la protectrice de son enfance ?
Non seulement Proust avait tout lu, et tout retenu selon ses amis, (c’était un virtuose de la citation), mais il a beaucoup théorisé...