Chassé vers le paradis

Après la montée du nazisme, l’Allemagne offre ses plus grands musiciens au reste du monde, notamment aux États-Unis où affluent les meilleurs. La musique américaine sera à jamais bouleversée par ces exilés souvent couronnés de succès mais à jamais déchirés. Témoin le destin du légendaire chef d’orchestre Bruno Walter.

Depuis la fenêtre de sa chambre d’hôtel, à Leipzig, il peut bien les voir, ces chemises brunes. Elles se rassemblent pour le lever du drapeau sur la Rossplatz, juste en face. Peu auparavant, il a été témoin de la façon dont elles ont arraché de son vélo un garçon boulanger et l’ont roué de coups, uniquement parce qu’il n’avait pas fait le salut hitlérien. Mais, à présent, elles constituent la toile de fond d’une agression d’un genre tout différent. Elles sont là pour lui, le grand chef d’orchestre Bruno Walter. Elles exigent que son concert qui doit avoir lieu dans deux jours, le 17 mars 1933, soit « annulé », mais la direction de la salle n’est pas prête à se laisser intimider. On a sa fierté de citoyen de Leipzig. Et l’on a des contacts, des coups de fil sont passés. Par exemple à Winifred Wagner, à Bayreuth. Cette intime de Hitler est convaincue que le nouveau chancelier « désapprouve complètement » ces attaques. Mais cela n’aide guère. « Pour des raisons d’ordre public », le concert ne peut avoir lieu. « Pour des raisons d’ordre public » ?...
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Espaces cuturels et universalité esthétique de Chassé vers le paradis, Text und Kritik

ARTICLE ISSU DU N°37

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