Publié dans le magazine Books n° 35, septembre 2012. Par Kenneth Minogue.
Montesquieu et Tocqueville ont joué un rôle majeur dans la conception américaine de la liberté. Mais leur enseignement est aujourd’hui perverti par la montée du « politiquement correct » et la servilité des citoyens occidentaux envers des dirigeants précepteurs de morale et dispensateurs de bonheur.
Comme les sages en conviennent, la plupart des gens traversent leur vie en somnambules. Nous nous habituons si bien à nos coutumes et à l’ordre des choses que nous remarquons à peine les infimes évolutions sociales qui, avec le temps, deviennent transformations majeures. Les années passent, et c’est seulement quand nos cheveux commencent à grisonner que nous prenons conscience de fréquenter un monde étrange, dominé par la jeunesse. Et le phénomène se reproduit à chaque génération. C’est cela, entre autres, être moderne. Mais cela importe-t-il ? En règle générale, non. La vie continue comme avant, à moins que ne survienne un épisode terrible, comme celui qu’ont vécu les Européens avant la Seconde Guerre mondiale. Ils s’avisèrent alors qu’ils avaient perdu cette chose essentielle, leur liberté. À des moments différents, les Russes, les Italiens et les Allemands ont connu ce destin, sombrant sans presque s’en apercevoir dans l’esclavage idéologique du totalitarisme. Moralité : mieux vaut rester vigilant.
Éviter de se laisser « dépasser par les événements » n’a pourtant rien d’évident. Cela tient notamment au fait que nous persistons à employer les mêmes mots pour dé...