Publié dans le magazine Books n° 92, novembre 2018. Par Baptiste Touverey.
Les ravages de la grippe espagnole il y a tout juste cent ans ont été largement sous-estimés. La faute, notamment, à une vision trop centrée sur l’Europe.
Le cimetière chinois de Nolette s’étend au milieu des champs, en contrebas d’un village aux maisons de briques rouges. Les 800 Chinois qui y sont enterrés avaient été envoyés à partir de 1917 participer à l’effort de guerre allié. Mais aucun d’entre eux n’est mort au combat. Tous étaient des travailleurs civils. Ils ont succombé à la maladie. Pour la plupart, vraisemblablement, à la grippe espagnole. Il n’est pas exclu que certains d’entre eux aient, d’ailleurs, été à l’origine de l’épidémie en Europe. À moins qu’ils n’aient été contaminés sur place, peut-être après l’arrivée des troupes américaines, suspectées elles aussi d’avoir répandu la grippe sur le Vieux Continent.
Une origine encore inconnue
L’un des plus grands mystères de cette pandémie sans équivalent au XXe siècle est celui de son origine : cent ans après, on ne sait toujours pas d’où elle est venue exactement, de la province chinoise du Shanxi, du nord de la France ou bien du Kansas. Comme le note la journaliste scientifique Laura Spinney dans l’ouvrage qu’elle lui a...