Toujours trahies
Publié dans le magazine Books n° 123, janvier-février. Par Baptiste Touverey.
C’est l’écueil par excellence des révolutions : elles sont lancées par des modérés mais vite récupérées par des extrémistes, et sombrent dans la violence. Cet implacable processus, Daniel Chirot le voit à l’œuvre dans presque toutes les révolutions modernes, à commencer par celle qui a servi de modèle à toutes les autres, la française. « Les radicaux peuvent bien se réclamer d’idéaux utopiques, ceux-ci sont irréalisables et ne sont pas soutenus par la majorité du peuple. Alors, s’ils veulent rester au pouvoir, ils se tournent rapidement vers la répression brutale », dit-il dans un entretien accordé au site de l’Université de Washington, où il enseigne. Pour lui, à l’origine de toute révolution, il y a la faillite des élites, incapables d’effectuer les réformes qui s’imposent : « Des autocraties obstinées dirigées par des incompétents comme le chah d’Iran ou le tsar Nicolas II font taire l’opposition modérée, ne voient pas que le changement est nécessaire et finissent donc par provoquer des bouleversements violents. »...