Exit le biographe
Publié dans le magazine Books n° 116, novembre-décembre 2021.
Soucieux de contrôler le récit qui sera fait de sa vie, en particulier de ses relations avec les femmes, le romancier Philip Roth a choisi de confier cette mission à Blake Bailey. Mais, à peine paru, l’ouvrage a été retiré du marché en raison des accusations d’agressions sexuelles visant le biographe.
Philip Roth, ici en 2009, redoutait ce qu’un biographe pourrait écrire de sa vie. Il a donc choisi lui-même Blake Bailey. Un choix qui ne s’avère pas si judicieux…
«De nombreuses figures littéraires redoutent le spectre du biographe », écrit David Remnick dans The New Yorker. Considéré comme le dernier géant des lettres américaines, Philip Roth était, lui, particulièrement sujet à « l’anxiété biographique », note le rédacteur en chef du magazine new-yorkais. « Il y a une forme de prédation dans le fait de raconter l’histoire d’un autre : Roth s’est débattu avec ce thème tout au long de sa carrière, souligne Remnick. Et jusqu’à sa mort, en 2018, il a dépensé beaucoup d’énergie à courtiser des biographes, espérant qu’ils raconteraient son histoire d’une manière qui ne nuirait pas à son art ni à sa postérité. »
Ce thème est déjà présent dans L’Écrivain des ombres (Gallimard, 1981), premier du cycle de neuf romans liés par le même narrateur, Nathan Zuckerman, le double fictionnel de Roth. Dans Exit le fantôme (Gallimard, 2009), Nathan Zuckerman est atteint d’un cancer de la prostate. « Pourtant,...