Vivre avec les fantômes
Publié dans le magazine Books n° 114, juillet-août 2021.
À la mort de son père, un fils découvre le passé trouble de celui-ci. Récit d’une filiation ratée, le roman dresse un bilan sévère de l’histoire récente de la Grèce.
En Grèce, la vie littéraire et politique reste peuplée par les fantômes de la guerre civile (1946-1949) et de la dictature (1967-1974). Ici à Athènes, en 2011.
Dans la Grèce dévastée par la crise économique des années 2010, un père à l’article de la mort dévoile à son fils, un écrivain quinquagénaire, une vie entière passée dans le secret. Ce dernier découvre un personnage collaborateur pendant l’Occupation, puis mouchard sous les colonels. Au cours d’un étrange passage de relais, le fils endeuillé confie l’histoire de son père à un ami d’enfance, le narrateur, qui se révélera être l’orphelin d’un progressiste. Ensemble, les deux hommes vont tenter de recomposer les figures de ces pères absents et à bien des égards mystérieux.
La poursuite de ces vies cachées constitue le moteur de ce roman célébré par Toúla Repáni, dans la revue culturelle en ligne Tetrágono, comme un futur « classique de la littérature grecque contemporaine. » Polyphonique, entremêlant les générations, ce récit nous mène de l’Athènes de décembre 1944 – en pleine guérilla urbaine opposant les communistes aux Britanniques, sous les bombes qui « changeaient quotidiennement le tracé de la ville » – à la...