Publié dans le magazine Books n° 35, septembre 2012. Par Dana Goodyear.
Et si, surmontant leur dégoût ancestral, les Occidentaux se mettaient à manger des insectes, comme 80 % des habitants de la planète ? Cette inépuisable source de protéines, qui pourrait nourrir le monde sans dommage pour l’environnement, est aussi une inépuisable source de plaisir culinaire. Les plus grands chefs s’en emparent.
Florence Dunkel, entomologiste à l’université d’État du Montana, attrape un vieux livre de recettes, et met ses lunettes. Elle l’ouvre à la page, jaune à force d’être tournée, de la recette des cookies aux pépites de chocolat. Comme bien des cuisinières, Florence aime personnaliser ses recettes. Celle-ci prend pour ingrédient une demi-tasse de noix pilées. Dans la marge, de son écriture ronde, Florence a suggéré une variante : « ou des criquets fraîchement grillés ».
Mais il y a un problème. Son fournisseur habituel de criquets, en Californie, n’en a plus de grands, et lui a envoyé à la place un millier de minuscules criquets pygmées vivants (des bébés) auxquels elle a dû ajouter 125 jeunes adultes achetés – au prix fort – chez PetSmart
[le premier distributeur de produits pour animaux aux États-Unis]. Avant de tester sa recette, Florence prend l’un des mini-criquets. « Je n’ai jamais utilisé ceux-là pour cuisiner », dit-elle, malaxant la chose entre le pouce et l’index, tel un chef inspectant un morceau de viande inhabituel. « Je ne sais même pas si je vais enlever la tête. » Quoi qu’il en soit,...