Publié dans le magazine Books n° 101, octobre 2019. Par Matthias Stolz.
Dans une cave de l’université de Bonn dorment les archives de l’«Atlas ethnographique allemand ». Ce vaste projet, lancé en 1928 puis dévoyé par les nazis, a pris fin dans les années 1980. Nombre d’ethnologues le jugent suspect, mais l’un d’eux s’est mis en tête de le réhabiliter.
Ce qui reste de l’un des projets de recherche les plus coûteux et les plus longs de l’histoire allemande est aujourd’hui sous la responsabilité d’une jeune doctorante. Valeska Flor est chercheuse à l’Institut d’anthropologie culturelle de Bonn et elle a en sa possession la clé de la salle U01.011, au sous-sol de l’institut, un bâtiment d’après guerre situé non loin du Hofgarten. « Cela fait au moins un an que je n’y ai pas mis les pieds », confie-t-elle en ouvrant la porte. Une odeur de renfermé vous accueille, et quiconque est allergique à la poussière a intérêt à faire demi-tour.
La pièce, qui fait à peu près la taille d’une salle de classe, est remplie d’étagères métalliques sur lesquelles s’alignent des boîtes à fiches en carton. Quand on ouvre l’une d’elles, des miettes de papier se répandent sur le sol. Chaque boîte porte un numéro de 1 à 243 sous lequel on distingue d’autres chiffres plus petits inscrits à l’encre et au pochoir. Tout devait être bien classé.
Ce qui est entreposé à Bonn, ce sont les reliques d’...