Publié dans le magazine Books n° 82, mars / avril 2017. Par Nancy Jo Sales.
Aux États-Unis, le développement fulgurant des applications de rencontres dope la culture du « hookup », le coup d’un soir. Du moins chez les jeunes actifs urbains et les étudiants, hommes comme femmes. Certains y voient une mutation sociale comparable à celle du néolithique. Les controverses vont bon train.
Une douce nuit dans le quartier financier de Manhattan, dans un bar sportif du nom de
Stout. Tout le monde est sur Tinder. Les tables sont occupées par des jeunes, garçons et filles, qui ont couru toute la journée après l’argent et les deals à Wall Street, et maintenant les voilà en quête d’un plan drague. Tout le monde boit, l’œil sur l’écran, « swipant » sur les visages d’inconnus avec lesquels on couchera plus tard dans la soirée. Ou pas. « Beurk, ce type ressemble à mon père », dit une jeune femme à propos d’un « match » potentiel, qu’elle élimine d’un « swipe » vers la gauche (1). Sa copine rigole en coin, sans même lever la tête. « Tinder, c’est nul », disent-ils tous. Mais ils n’arrêtent pas de swiper.
Dans un box vers le fond du bar, trois garçons, bien de leur personne, la vingtaine, chemise américaine, boivent des bières. Dan, Alex et Marty sont des banquiers d’affaires en herbe qui travaillent dans la même boîte, laquelle a recruté Alex et Marty directement dans leur université de l’Ivy League (2). Quand...