Publié dans le magazine Books n° 62, février 2015. Par John McDermott.
Cela ne fait guère de doute : la révolution numérique aura des conséquences profondes sur l’emploi. Après avoir évincé les postes routiniers, l’intelligence artificielle se substituera à bon nombre d’emplois qualifiés. Déjà, les logiciels écrivent des articles, rédigent des actes juridiques, remplacent les traders. Apocalypse ou renaissance ? Les économistes s’affrontent, mais une chose est sûre : le rôle de l’État sera décisif pour prendre le meilleur de cette mutation en évitant le pire.
Ce pourrait bientôt être des robots qui écriront les articles sur l’avenir. Si les prédictions les plus hardies concernant la technologie se révèlent justes, les humains comme vous continueront à lire des articles, mais les humains comme moi ne feront plus ni recherches, ni analyses, ni interviews, ni transcriptions, ni gribouillages, ni plans, ni brouillons, ni révisions, ni réécriture, ni corrections, ni validations. L’intelligence artificielle n’aura rendu que trop réelle l’insuffisance de mon intellect.
Installée à Chicago, Narrative Science entend que cette évolution se produise dès que possible. Les algorithmes de la firme permettent déjà de communiquer en avant-première les comptes trimestriels des entreprises ou de raconter des rencontres sportives. Certes, il existe un fossé entre la rédaction de comptes rendus lapidaires sur des événements riches en données et l’écriture d’articles plus complexes. Mais Narrative Science voit grand ; c’est l’une des nombreuses entreprises dont le but est de frapper d’obsolescence les postes les plus intellectuels eux-mêmes.
L’idée que des machines intelligentes puissent remplacer une grande partie du travail humain semble relever de la science-fiction. Mais la...