Singulière princesse moghole
Publié en juin 2024. Par Books.
En 1576, à l’époque de notre Henri III, une princesse moghole, fille de l’empereur Babur, obtint l’autorisation de son neveu Akbar, le fameux souverain dont on visite encore le palais à Agra, au sud-est de Delhi, de se rendre en pèlerinage à La Mecque et à Médine. Avec sa suite elle y resta quatre ans. Sur le chemin du retour, son bateau fit naufrage près d’Aden, mais elle revint. Elle était lettrée, et en 1587, alors qu’elle avait 63 ans, Akbar lui confia la tâche de rédiger ses souvenirs à la cour de son père puis de son demi-frère Humayun, qui lui avait succédé. Ce texte devait être incorporé dans l’Akbarnama, histoire officielle de l’empire. Elle était la seule femme à être invitée à y contribuer et son manuscrit, inachevé, est l’unique texte émanant d’une femme dans le XVIe siècle moghol. Elle est morte en 1603, à l’âge de 80 ans.De cette femme hors du commun on sait en réalité assez peu de choses, d’autant que son manuscrit, très court, s’arrête en plein vol, au milieu d’une phrase, sans qu’on sache pourquoi. Spécialiste de la civilisation moghole, l’Américaine Ruby Lal tisse un récit en partie imaginaire, destiné à faire revivre cette culture si particulière, dont les chefs jusqu’alors itinérants se sont transformés en empereurs. Gulbadan Begum, la « princesse au corps de rose », est née sous l’auvent d’une tente. Âgée de seulement 7 ans, elle avait fait le voyage de Kaboul à Agra pour rejoindre son père. « Un triomphe de reconstruction historique », écrit le spécialiste de l’Inde John Keay dans le Times Literary Supplement.