Publié dans le magazine Books n° 80, novembre - décembre 2016. Par Birgit Schäbler.
Le débat moderne sur l’islam a été lancé en 1883, lors d’une conférence virulente donnée par Ernest Renan. Ses propos lui ont attiré une réponse en règle d’un des plus grands intellectuels musulmans de l’époque : Al-Afghani.
Le 29 mai 1883, l’historien et spécialiste des religions Ernest Renan donne une conférence à la Sorbonne. Celui dont le nom est aujourd’hui, en Allemagne, avant tout associé à l’essai
Qu’est-ce qu’une nation ? est à l’époque une célébrité en Europe ;
La Vie de Jésus y a connu un énorme succès. Outre l’histoire du christianisme, il a aussi longtemps étudié celle du judaïsme. En comparaison, l’islam n’occupe que quelques pages dans son œuvre imposante – mais ces pages existent bel et bien. Ce soir-là, sa conférence s’intitule « L’islamisme et la science ». Elle lance un débat qui se poursuit encore aujourd’hui.
Au XIXe siècle, la science est le nec plus ultra et Renan la considère comme la quintessence de la modernité. Dans les pays musulmans, en revanche, il ne voit que « la nullité intellectuelle des races ». La faute à l’islam, selon lui. Ce sont l’éducation et la culture islamiques qui ferment les musulmans à la science, les rendent incapables de « rien apprendre ni de s’ouvrir à aucune idée nouvelle ».
Comme le remarqua plus tard la philosophe Hannah Arendt, Renan est...