Publié dans le magazine Books n° 105, mars 2020. Par Abhijit V. Banerjee et Esther Duflo.
En trente ans, le nombre de pauvres a diminué de plus de moitié dans le monde. La croissance forte y a été pour beaucoup. Mais nul ne sait comment la faire durer. À défaut, les lauréats du Nobel d’économie 2019 proposent d’imaginer et d’évaluer des solutions qui améliorent l’existence des plus démunis.
L'explosion des inégalités dans les pays riches a beau susciter des inquiétudes aujourd’hui, la situation des pauvres s’est considérablement améliorée ces dernières décennies dans le monde. Entre 1980 et 2016, le revenu moyen des 50 % les moins riches a presque doublé, cette tranche de la population ayant capté 12 % de la croissance du produit intérieur brut (PIB) mondial. Le nombre de personnes qui vivent avec moins de 1,90 dollar par jour – le seuil international de pauvreté défini par la Banque mondiale – a diminué de plus de moitié depuis 1990, passant de près de 2 milliards à environ 700 millions. Jamais dans l’histoire de l’humanité autant de personnes n’étaient sorties aussi rapidement de la pauvreté.
La qualité de vie s’est également considérablement améliorée, même pour ceux qui vivent encore dans la pauvreté. Depuis 1990, le taux mondial de mortalité maternelle a été divisé par deux. Il en va de même pour le taux de mortalité infantile, ce qui a sauvé la vie de plus de 100 millions d’enfants. Aujourd’hui, hormis dans les pays en proie à de graves conflits, presque tous les enfants, garçons et filles,...