Publié dans le magazine Books n° 80, novembre - décembre 2016. Par Andreas Sentker.
La propagande nazie a discrédité la rhétorique, née il y a 2 500 ans en Sicile. Elle se résume désormais aux « petites phrases » cousues sur mesure pour les médias. Bien comprise, elle est pourtant le meilleur antidote contre la propagande. Il est urgent de réapprendre que l’art de « bien dire » est aussi l’art de « dire le bien ». N’est-ce pas, Martin Luther King ?
Il apporte son propre pupitre. À droite et à gauche, il fait installer les vitres à demi transparentes des téléprompteurs. Ce sera sa dernière grande apparition en Allemagne. « Aux Européens », c’est ainsi que ses collaborateurs ont intitulé le texte. Et c’est bien à eux, aux Européens, que Barack Obama s’adresse : le 25 avril 2016, il prononce à Hanovre l’un de ces discours qui l’ont rendu célèbre et fait élire président des États-Unis.
Charismatique et charmant, malicieux et poignant, il passe avec aisance d’un registre à l’autre. Son discours semble sorti tout droit d’un manuel : au début, ce que les rhétoriciens appellent la
captatio benevolentiae, le fait de s’attirer la bienveillance de l’auditoire (« Je dois avouer que le peuple allemand occupe dans mon cœur une place toute particulière »). À la fin, une
conclusio classique (« Car une Europe unie, jadis le rêve d’une poignée de personnes, est désormais l’espoir de beaucoup et une nécessité pour nous tous »).
Obama cherche le contact visuel avec son public. Il ménage ses effets en marquant des pauses à point nommé. Il semble dé...