Rabindranath Tagore, mage et critique

Un saint dans le monde moderne, un poète inspiré apportant à l’Occident la sagesse indienne, un mystique un peu cinglé ? L’aura dont a bénéficié l’écrivain philosophe est vite retombée, malgré son prix Nobel. Reste la modernité d’un critique social au regard aigu. Soutien de Gandhi, il fut aussi l’un des premiers à stigmatiser la condition des femmes dans son pays.

Pour donner une idée de ce que Rabindranath Tagore a représenté pour l’imaginaire européen du début du XXe siècle, il ne suffit pas de rappeler l’accueil extatique que lui ont réservé de grands écrivains comme Yeats – qui trouva dans L’Offrande lyrique, le premier recueil de poésie de Tagore à être traduit en anglais, « un monde dont [il] avai[t] rêvé toute [s]a vie » (1). Ni même de rappeler que Tagore, né en 1861, fut en 1913 le premier écrivain asiatique à recevoir le prix Nobel de littérature. Il vaut mieux s’intéresser à l’aventure suivante, censée s’être produite dans les tranchées durant la Première Guerre mondiale, et rapportée des années plus tard par le dramaturge allemand Carl Zuckmayer. Un ami de ce dernier, brancardier dans l’armée du Reich, lui raconta que son unité avait un jour capturé un Indien grièvement blessé, qui servait dans l’armée britannique. Pour lui sauver la vie, les médecins allemands devaient l’amputer d’une jambe, mais, comme ils ne parlaient pas anglais, ils ne pouvaient pas lui expliquer la chose, et...
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The Essential Tagore de Rabindranath Tagore, mage et critique, Harvard University Press

ARTICLE ISSU DU N°55

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