Peau noire, blouses blanches
Publié dans le magazine Books n° 112, novembre 2020. Par Neil Singh.
Aujourd’hui encore, l’enseignement de la dermatologie est presque exclusivement fondé sur la peau claire. Or les affections cutanées se manifestent différemment selon la pigmentation. Lassés des mauvais diagnostics, de plus en plus de patients non blancs se détournent de la médecine.
Une étude de 2016 montre qu’un tiers des médecins américains croient encore à certaines idées reçues sur la peau noire, comme le fait qu’elle serait plus épaisse.
Par une chaude journée d’été, je m’entretiens dans mon cabinet avec un patient. C’est un homme noir d’une petite quarantaine d’années dont les cheveux grisonnent aux tempes. Avec son tee-shirt noir et son bermuda en jean, il fait plus jeune que son âge. Il est venu consulter pour un problème de peau et, lorsqu’il soulève son tee-shirt pour me montrer son torse, je suis stupéfait de voir qu’il est parsemé de plaques squameuses de couleur argentée.
Je ne sais pas quoi en penser. Je m’inquiète et imagine toutes sortes de causes, graves pour certaines. Mais il me rassure : « J’ai souvent ça. » Voyant mon regard vide, il m’explique gentiment : « J’ai du psoriasis. » Je reprends son dossier médical. Le diagnostic y est bien mentionné, mais il m’avait échappé : psoriasis en plaques chronique. Il fait une nouvelle poussée et se demande s’il ne pourrait pas essayer un nouveau traitement. Au bout du compte, c’est un cas banal, il suffit de lui prescrire une autre pommade. Mais cela me travaille : si ça avait été...