Publié dans le magazine Books n° 104, février 2020. Par Olivier Postel-Vinay.
L’idée que les activités humaines sont responsables des dérèglements climatiques ne date pas d’hier. Il y a deux ou trois siècles déjà, théologiens et naturalistes redoutaient que l’homme, par ses innombrables péchés, fasse de la Terre un enfer.
À la fin du XVI
e siècle, une apothicaire de Padoue, Camilla Erculiani, fut traduite devant l’Inquisition pour avoir dénoncé les effets néfastes de l’activité humaine sur l’environnement. Les inondations accompagnées d’épidémies de peste dans le nord de l’Italie illustraient à ses yeux une catastrophe planétaire, accentuée par la surpopulation mais provoquée en dernière analyse par des pratiques pécheresses. Pour l’historienne Lydia Barnett, le recueil de lettres qui lui valut d’inquiéter l’Église est « le premier document à proposer une argumentation cohérente, systématique et scientifique sur le pouvoir qu’a l’espèce humaine de provoquer des dégâts catastrophiques sur l’environnement mondial ».
Un siècle plus tard, au cœur du Petit Âge glaciaire, le théologien anglican Thomas Burnet, qui correspondait avec Newton, soutenait que la planète était devenue, du fait de l’homme, « un énorme monceau de détritus » – formule reprise quasiment à l’identique par le pape François en 2015 dans l’encyclique
Laudato si’. Comme Camilla Erculiani et Thomas Burnet, le pape pensait au paradis décrit par la Genèse,...