L’Histoire serait-elle en train de se répéter ?
Publié dans le magazine Books n° 123, janvier-février. Par Julian Lucas.
La quasi-totalité des débats autour de la restitution du patrimoine culturel de l’Afrique a déjà eu lieu il y a quarante ans. Les voies ouvertes alors se sont silencieusement refermées, consacrant la victoire des conservateurs des musées occidentaux. Allemands, Britanniques et Français se sont retranchés derrière des arguments souvent jugés spécieux.
Un jour de mai 2018, dans le hall du musée d’Aquitaine, à Bordeaux, l’artiste nigérian Jelili Atiku se mit à appeler à l’aide. « Je veux rentrer chez moi, criait-il. Bénin, Edo… Ramenez-moi à la maison ! » Habillé en guerrier de bronze, pieds et poings liés, un drapeau britannique gisant au sol, il mimait le désespoir d’une statuette prise au piège dans le musée qu’il finissait par fuir torse nu, révélant sa peau recouverte de peinture métallique. Sa performance artistique mettait en scène les efforts longtemps infructueux du Nigeria pour récupérer les « bronzes du Bénin », une collection de plusieurs milliers d’œuvres volées en 1897 lors du sac de Benin City par l’armée britannique. Aujourd’hui, elles sont dispersées parmi plus d’une centaine d’institutions à travers le monde, principalement au British Museum.
Pendant des décennies, les bronzes du Bénin ont servi d’emblème à la lutte pour la restitution des œuvres d’art africaines dérobées pendant la colonisation....