Publié dans le magazine Books n° 75, avril 2016. Par Alan Judd.
Blanc d’œuf, jus de citron, arsenic, sperme… On a tout essayé ou presque, depuis des siècles, pour fabriquer la fameuse encre invisible.
L’encre invisible ou écriture secrète (ES, comme disent les espions) fut sans doute mise au point peu après l’invention de l’écriture. Souvent considérée comme le parent pauvre de sa sœur tellement plus raffinée, la cryptographie, elle a pourtant connu son heure de gloire au XXe siècle. Peut-être le déclin récent de la communication écrite la condamne-t-il à s’effacer. Après tout, qui donc envoie encore des lettres à l’heure des textos, tweets et compagnie ? Du point de vue de l’agent secret (profession exercée par l’écrasante majorité des utilisateurs de l’ES), il est toujours rassurant de se fondre dans la masse ; appartenir au groupe toujours plus restreint des épistoliers pourrait attirer l’attention. Cela dit, comme le souligne Kristie Macrakis dans son essai historique exhaustif, l’ES est en train de se muer discrètement en technique de dissimulation d’images numériques.
L’auteure fait remonter cette pratique aux Grecs et aux Perses de l’Antiquité, sans oublier la contribution des Chinois. Au départ, cela consistait le plus souvent à camoufler un message plutôt que de cacher des mots au milieu d’...