Les Indonésiens oublient leur histoire

La Booksletter n’est en principe consacrée qu’à des ouvrages non traduits. Nous faisons ici une exception, pour évoquer un pays que les médias français ont tendance à ignorer : l’Indonésie, quatrième État du monde par sa population. En février dernier, 200 millions d’Indonésiens inscrits sur les listes électorales ont élu à la présidence Prabowo Subianto. Cet ancien général avait contribué à l’invasion du Timor oriental en 1975 et soutenu la dictature de Suharto jusqu’à sa chute en 1998. Il était directement impliqué dans la répression, y compris l’enlèvement de militants hostiles à la dictature. En rendant compte du livre majeur de David Van Reybrouck consacré à la lutte des Indonésiens pour leur indépendance (les Hollandais avaient envoyé une armée les combattre, en 1945-1949), Max Lane, un spécialiste de l’Indonésie vivant à Singapour, en profite pour s’interroger sur les raisons pour lesquelles les Indonésiens ont élu, avec 58 % des voix, ce suppôt de l’ancienne dictature. « Les électeurs n’ont pas consciemment avalisé ses actions passées, écrit-il dans la Literary Review. Cela reflète plutôt le fait que l’histoire est pratiquement absente dans l’Indonésie actuelle. » Suharto avait pris soin de falsifier l’enseignement de l’histoire dans le cursus scolaire, et « cette falsification a perduré », souligne-t-il.

LE LIVRE
LE LIVRE

Revolusi. L’Indonésie et la naissance du monde moderne de David Van Reybrouck, Actes Sud, 2022

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