Les enfants d’Abraham en guerre
Publié en janvier 2011. Par Jean-Louis de Montesquiou.
Ardemment polythéiste, l'Inde semble fascinée par les monothéismes, si l'on en juge par le succès du dernier ouvrage de Talmiz Ahmad *. La notoriété de l'auteur, diplomate indien, actuel ambassadeur en Arabie Saoudite, y est pour beaucoup. Mais c'est la thèse du livre qui stimule le public : si « Les Enfants d'Abraham » – les trois monothéismes, chrétien, juif et musulman – se combattent depuis des siècles à tour de rôle, c’est que la violence est inscrite dans leurs gènes. Explication : « les concept de ‘’félicité éternelle’’, avec quelques variantes, et de ‘’vie éternelle’’, sont au centre des trois principales croyances sémitiques » – cf. Armageddon, la Seconde Venue du Christ, l’Imam Caché, etc. Avec ce corollaire : pour introduire l'ère nouvelle, il faut précipiter la fin de celle-ci, en hâtant le triomphe du Bien sur le Mal. Et c'est ainsi, commente Saeed Naqvi sur IndiaCom, que furent légitimées chez les peuples du Livre les violences religieuses, des croisades de Saint-Bernard à celles de George Bush. Talmiz Ahmad empile les citations érudites montrant la funeste rencontre des trois monothéismes autour des « concepts interchangeables de millénarisme, d’apocalyptisme, ou de messianisme », qui, à des degrés divers, font de la guerre une obligation religieuse, l'outil de la destruction du monde puis de sa divine rédemption. Christianisme, judaïsme, islamisme comportent chacun un « ferment de violence » et « se croient munis d'un mandat divin de destruction » ; « la religion fournit de plus en plus l'idéologie, la motivation et la structure organisationnelle pour perpétrer la violence dans le monde ».