Publié dans le magazine Books n° 14, juillet-août 2010. Par James Penrose.
Mozart fut enterré en catimini, Beethoven en grande pompe. Ce contraste en dit long. Il traduit le moment où la musique devient véritablement sacralisée. Son influence est telle, désormais, qu’elle participe aux bouleversements du monde, jouant notamment les premiers rôles dans l’affirmation des identités nationales. Dès le XIXe siècle, la popularité des Rossini, Paganini et autres Liszt préfigure celle des rock stars. Mais comment expliquer cette emprise ?
Après la mort du
Kapellmeister Mozart, le 5 décembre 1791, les choses allèrent très vite. L’après-midi même, autour de quatorze heures, en raison de l’état de la dépouille, le cadavre fut transporté à la cathédrale Saint-Étienne, à Vienne, pour y recevoir une bénédiction expéditive. Puis les fossoyeurs conduisirent le corps au cimetière Saint-Marx où, conformément à une ordonnance municipale de l’empereur Joseph II, on sortit le corps du cercueil pour le jeter dans une fosse commune. Toute l’affaire semble avoir duré à peine quatre-vingt-dix minutes, le soleil se couchant juste après seize heures. Personne, pas même la veuve, n’assista aux obsèques. Aujourd’hui encore, l’endroit exact où est enterré Mozart reste un mystère. Bien que Joseph Haydn, le grand ami du compositeur, ait déclaré qu’on « ne verrait pas de talent pareil avant cent ans », personne ne s’est vraiment soucié, pendant toutes ces années, de l’endroit où reposait le compositeur.
À un peu plus de trois kilomètres et trente-six ans de distance, la situation était devenue bien différente : la mort de Beethoven, en mars 1827, a...