Publié dans le magazine Books n° 75, avril 2016. Par Jonathan Steele.
Depuis 2011, le Kurdistan syrien s’est érigé en mini-État autonome. Grâce à une sorte de pacte de non-agression avec le régime, ses 2,2 millions d’habitants, arabisants, urbanisés, laïcs, vivent dans une paix relative qui leur permet de faire renaître leur langue et leur culture. Au cœur du système, un parti dominant, d’obédience marxiste. Ses milices, où les femmes combattent aux côtés des hommes, sont l’ennemi numéro 1 de Daech dans la région.
Pour qui cherche le moindre rayon de lumière dans la nuit syrienne, le mieux à faire est de se rendre dans le nord-est du pays. Là, quelque 2,2 millions de Kurdes ont créé un quasi-État étonnamment sûr – et étrangement peu connu à l’étranger. L’aviation de Bachar al-Assad ne lâche pas ses bombes-barils sur la région. Le port du niqab n’y est pas imposé par les exécuteurs des basses œuvres de Daech. Aucune frappe aérienne turque ne fait fuir les civils comme le font les attaques de l’armée d’Ankara contre les bases des milices kurdes à la frontière avec l’Irak.
La sécurité est bien sûr un concept relatif. Les voitures piégées et les attentats-suicides commis par les assassins de l’État islamique ôtent régulièrement des vies dans cette région syrienne de 400 kilomètres de large qui s’étend entre le Tigre et l’Euphrate. Mais, au regard des normes en vigueur dans le reste du pays, la région paraît tranquille.
Les 2,2 millions de Kurdes représentent 10 % de la population syrienne. Au printemps 2011, comme leurs compatriotes arabes des autres villes du pays,...