Le mythe de la transparence
Publié dans le magazine Books n° 115, septembre-octobre 2021. Par Sebastian Dieguez.
Qui voudrait moins de transparence ? Pourtant, revendiquer plus de transparence dans les décisions publiques revient davantage à afficher sa naïveté que sa vertu.
Mettons tout sur la table ! Finissons-en avec les secrets, les fourberies, les ruses, les cachotteries, les manipulations, les dissimulations et les coups fourrés. « La lumière du soleil est le meilleur désinfectant », disait Louis Brandeis, juge à la Cour suprême des États-Unis – un slogan parmi beaucoup d’autres visant à glorifier les vertus de la transparence.
L’idée semble aller de soi, à tel point qu’on imagine mal comment on pourrait s’y opposer. Qui voudrait moins de transparence ? De fait, la transparence est quasiment devenue synonyme de démocratie : un peuple libre est un peuple éclairé et correctement informé, donc plus il aura d’informations brutes à sa disposition, mieux il sera en mesure de se déterminer. L’inverse de la transparence n’est-il pas l’opacité, là où se jouent les conflits d’intérêts, où se nouent les liens d’influence, où se manufacture la propagande et où fermente la corruption ?
Hélas, les séductions de la transparence ne sont attirantes qu’en surface. Elles trahissent un phénomène que le philosophe Karl Popper, dans...