Le droit des autres
Publié en avril 2009.
Il existe un paradoxe de fond entre intégration européenne et exclusion des ressortissants des pays tiers, explique Seyla Benhabib, philosophe et politologue turque enseignant à l’université américaine de Yale.
Il existe un paradoxe de fond entre intégration européenne et exclusion des ressortissants des pays tiers, explique Seyla Benhabib, philosophe et politologue turque enseignant à l’université américaine de Yale. L’abandon d’un nombre croissant de prérogatives nationales au profit de l’Union européenne ne peut aller de pair avec l’adoption de lois de plus en plus restrictives en matière de circulation des personnes ou d’immigration. Seyla Benhabib montre que ces mesures s’appuient sur des principes contradictoires dans deux livres traduits de l’anglais en allemand et commentés par Hilal Sezgin dans Die Zeit. Autre évolution paradoxale, celle du droit de vote. Pourquoi l’accorder aux ressortissants européens pour les élections locales, si c’est pour en faire des citoyens de seconde zone lors des autres scrutins ? Dernier exemple : le droit de manifester et celui de s’exprimer librement, inscrits dans les constitutions occidentales. Dans de nombreux pays du vieux continent, ils s’appliquent aux étrangers européens mais pas aux autres – deux poids, deux mesures. Ces situations sont le fruit de l’histoire ; d’une histoire faite de la progression des droits mais qui reste inachevée. Cela n’empêche pas Seyla Benhabib de poser cette question générique : comment intégrer l’ensemble des étrangers si l’on ne leur octroie pas à tous les mêmes droits ?