Le douloureux destin des artistes cubains
Publié dans le magazine Books n° 121, septembre-octobre 2022. Par Mónica Baró Sánchez.
Ils sont poètes, acteurs, chanteurs, performeurs – et ils sont traqués par le régime pour avoir osé défendre leur liberté de créer. À Cuba, les artistes font depuis quelques années l’objet d’une répression musclée. Certains se résignent à quitter l’île, d’autres choisissent de rester pour organiser la résistance. D’autres encore, moins chanceux, croupissent en prison.
« On se voit dans neuf jours. » Ce sont les derniers mots que Yanelys Núñez a dits à sa mère, le 3 mars 2019, avant de quitter Cuba pour Prague afin d’y suivre un atelier de journalisme vidéo, sans savoir que ce serait un prélude à son exil à Madrid. Les deux femmes se sont séparées fâchées. L’activisme de Yanelys était une source de tensions au sein de sa famille – et de stress pour elle-même. L’année précédente, en janvier 2018, elle avait souffert d’une paralysie faciale. À 28 ans, c’était la seconde fois que cela se produisait. Elle y a vu un avertissement : « Mon corps me disait que je ne pouvais pas continuer à vivre à ce rythme », raconte-t-elle. Mais, dans les mois qui ont suivi, la jeune femme n’a pas relâché la pression, bien au contraire.
L’année 2018 a été décisive dans l’histoire récente de l’île. En mai s’est tenue la Biennale 00, un festival indépendant...