Publié dans le magazine Books n° 76, mai 2016. Par Hugh Eakin.
Célèbre pour sa généreuse protection sociale, le Danemark se révèle aussi, c’est moins connu, un pionnier des politiques anti-immigration. Terrifié à l’idée que la crise des réfugiés ne submerge l’État-providence, le pays a conçu une politique d’austérité asilaire qui fait consensus. C’est que l’égalitarisme à la danoise repose sur conception très exclusive de l’identité nationale.
Dans tous les pays d’Europe, la crise des réfugiés syriens soumet les milieux politiques à une pression intense. En Pologne, les électeurs ont porté au pouvoir un parti de droite dont le leader, Jarosław Kaczyński, déclare que les migrants introduisent en Europe « des maladies dangereuses » et « différents types de parasites ». En France, lors des élections régionales de décembre, certains candidats socialistes se sont retirés pour soutenir les candidats de droite et empêcher le Front national de l’emporter. Même l’Allemagne, qui a accueilli en 2015 plus de 1 million de demandeurs d’asile, a dû reculer face à la révolte montante au sein du propre parti de la chancelière Angela Merkel et aux viols du Nouvel An à Cologne, imputés à des hommes d’origine nord-africaine.
Et puis il y a le Danemark. Cette petite et riche démocratie scandinave de 5,6 millions d’habitants est, selon la plupart des classements, l’un des pays les plus ouverts et les plus égalitaires au monde. Les disparités de revenus et le taux de pauvreté y sont parmi les plus faibles des nations occidentales. Connu pour avoir des villes au bilan carbone...