Publié dans le magazine Books n° 19, février 2011. Par Cathy Gere.
Il y a aujourd’hui plus de cellules d’Henrietta Lacks dans les laboratoires qu’il n’y en eut jamais dans le corps de cette Américaine noire et pauvre, morte en 1951. Tous les biologistes connaissent son nom. Mais peu savent le désarroi de ses enfants quand ils découvrirent, vingt ans plus tard, que leur mère avait révolutionné la médecine.
Feuilletez n’importe quelle revue de biologie, vous tomberez forcément sur des publicités pour les cellules HeLa, qui se vendent aux laboratoires du monde entier. Leur prix varie de quelques centaines à quelques milliers de dollars la fiole, selon les versions. Nombre d’acheteurs savent depuis longtemps que, derrière l’anodine et omniprésente étiquette HeLa se cache l’histoire d’un être humain. Le livre remarquable de Rebecca Skloot est désormais là pour leur en révéler les détails.
HeLa est le diminutif d’Henrietta Lacks. L’agonie de cette jeune mère afro-américaine de cinq enfants, morte il y a soixante ans, a ouvert la voie à une révolution médicale silencieuse. En janvier 1951, Henrietta Lacks était admise dans une salle de consultation réservée aux Noirs de l’hôpital Johns Hopkins, à Baltimore. Elle se plaignait de douleurs abdominales et de saignements irréguliers. Une semaine plus tard, elle revenait pour recevoir un traitement au radium (1) ; on lui avait diagnostiqué un cancer du col de l’utérus. Avant de commencer, le chirurgien préleva une petite quantité de tissus sur sa tumeur pour l’envoyer au laboratoire de George...