Publié dans le magazine Books n° 27, novembre 2011. Par Vladislav L. Inozemtsev.
Les cadres issus de l’ancien KGB ne sont pas responsables des déficiences du système politique. Le vrai problème, c’est l’arrivée aux postes clés d’une noria de nullités corrompues. Les meilleurs quittent le pays. La Russie est devenue une sorte d’État privé, de nature féodale, où la politique n’est qu’un type d’affaires parmi d’autres.
Nombre d’experts occidentaux décrivent aujourd’hui la Russie comme un pays sombrant dans le totalitarisme, suivant lentement (ou pas si lentement que ça) le chemin de l’Union soviétique, dont le régime autoritaire s’est effondré sous la pression croissante d’une société civile émergente. L’opinion commune impute ce tournant autoritaire à la nature de l’élite politique russe contemporaine. Ses membres, font valoir de nombreux analystes occidentaux comme Ian Bremmer dans sa « Courbe en J (1) », sont recrutés de façon disproportionnée dans ce qu’on appelle les
silovyié strouktoury, les instances chargées de faire appliquer la loi et les services de sécurité, dont on fait remonter les origines aux services secrets et à l’appareil militaire de l’ère soviétique. Ces convictions se conjuguent pour offrir, tout bien pesé, une lecture plutôt optimiste des perspectives à moyen ou long terme de la Russie : soit la société civile russe se réveillera à nouveau et sauvera la situation, comme elle est censée l’avoir fait en 1989-1991, soit l’élite actuelle vieillira et quittera la scène. Dans un cas comme dans l’autre, un changement positif se...