La deuxième vie du grèbe de l’Atitlan
Deux études menées récemment par le Muséum national d’histoire naturelle et le CNRS aboutissent à la même conclusion : en 17 ans, un tiers des oiseaux ont disparu des campagnes françaises. L’écrivain et peintre anglais Errol Fuller, expert en histoire des sciences naturelles a écrit une série de livres consacrés aux espèces disparues et en particulier aux volatiles. Dans Extinct Birds, il répertorie quelques quatre-vingts espèces d’oiseaux dont la disparition a été remarquée au cours de l’histoire. Beaucoup d’entre elles n’ont laissé que peu de traces. On ne connaît ainsi le pigeon de Liverpool qu’à travers un spécimen empaillé.
Fuller note d’ailleurs que la frontière entre l’extinction et la survie est floue. Ainsi le dernier grèbe de l’Atitlan est mort en 1990, mais survit génétiquement. Dépourvu de la capacité de voler, cet oiseau a été découvert en 1920 autour du lac Atitlan au Guatemala. Quarante ans plus tard, il ne reste plus que 80 individus. Les roseaux, qui constituaient son habitat naturel, ont été massivement exploités. Puis la compagnie aérienne Pan Am a fait du lieu un centre de villégiature pour pêcheurs. Elle a introduit des poissons qui ont disputé aux grèbes leurs proies habituelles et construit des bâtiments sur les berges du lac. Grâce aux efforts des écologistes, leur population réussit malgré tout à atteindre les 200 individus. Mais un tremblement de terre fait diminuer le niveau du lac de six mètres et isole le refuge des grèbes. Une espèce cousine capable de voler s’installe sur leur territoire et se reproduit avec les derniers grèbes de l’Atitlan. Aujourd’hui, l’histoire de l’évolution des grèbes survit dans le patrimoine génétique de cet hybride.
A lire dans Books : Qui a exterminé le pigeon migrateur, octobre 2014.