Publié dans le magazine Books n° 100, septembre 2019. Par Teresa M. Bejan.
N’importe quelle opinion doit-elle pouvoir s’exprimer ? Le débat qui agite depuis quelques années les campus américains trouve son origine dans la démocratie athénienne. Deux conceptions de la liberté d’expression entrent en conflit.
Rien ne distingue autant la démocratie américaine de son homologue européenne que la primauté qu’elle accorde à la
liberté d’expression et l’usage permissif qu’elle en fait. Les débats qui agitent actuellement les universités américaines montrent toutefois que la liberté d’expression ne fait plus consensus
1. Tandis que des étudiants de droite jugent essentiel de pouvoir inviter des personnalités controversées et tenir des propos offensants, beaucoup de leurs camarades de gauche s’emploient à leur clouer le bec, au besoin par des actions violentes. Car, à les en croire, certains ne se servent de la liberté d’expression que pour exclure et réduire les autres au silence. Il faut donc refuser de donner une tribune à des personnalités odieuses ou issues de catégories historiquement « privilégiées », si l’on veut une égalité effective, et que les exclus et les plus vulnérables puissent enfin s’exprimer – et être entendus.
Si l’invocation du premier amendement à la Constitution des États-Unis
2 ne suffit pas à trancher ces controverses universitaires, c’est parce qu’entrent...