Publié dans le magazine Books n° 87, janvier/février 2018. Par Sandra Lafuente.
Dans les années 1940, Franco fit ériger le Valle de los Caídos pour commémorer sa victoire dans la guerre civile espagnole. Cette monumentale église-mausolée abrite sa dépouille mais aussi les restes de milliers de ses victimes. Sans le consentement de leurs proches.
L’obscurité se fait tout d’un coup en pleine messe. Cette pénombre subite semble ramener le lieu à son état primitif, les profondeurs d’un rocher de granite. C’est aujourd’hui une église, mais, il y a un peu plus de soixante-dix ans, ce n’était qu’un mont haut de 1 400 mètres. Des prisonniers et des ouvriers l’ont creusé à la dynamite sur ordre d’un caudillo qui voulait y bâtir un monument pharaonique, tout à la fois basilique, panthéon et crypte. Éteindre la lumière au moment de la consécration fait partie du rituel. Tout est plongé dans les ténèbres sauf le Christ de l’autel, éclairé d’en haut.
Nous sommes dimanche 5 février à 11 heures, mais nous pourrions tout aussi bien être un mardi ou un vendredi. Nous sommes en 2017, mais il en est de même depuis 1959, année de l’inauguration du lieu : tous les jours, sauf le lundi, les moines bénédictins du Valle de los Caídos célèbrent avec la même solennité la messe conventuelle chantée.
Chaque jour, le prêtre officiant répète la même formule : « Prions le Seigneur...