Et la psychanalyse, dans tout ça ?
Publié dans le magazine Books n° 50, janvier 2014. Par Olivier Postel-Vinay.
On ne dira jamais assez le mal qu’un freudisme mal digéré a fait aux enfants autistes et à leur famille. L’idée que le handicap est favorisé par des parents trop froids a été popularisée notamment par Bruno Bettelheim et Françoise Dolto. Éradiquée aux États-Unis, contestée en France, cette conception reste pourtant influente dans notre pays. Témoin le scandale provoqué par un récent documentaire.
Aussi extravagant que cela puisse paraître, dans les années 1940 à 1970 aux États-Unis, la schizophrénie et l’autisme étaient couramment imputés à un comportement défectueux de la mère. Le phénomène tenait en partie à la domination de la psychiatrie américaine par l’école psychanalytique, dont nombre de représentants avaient fui l’Allemagne nazie. Frieda Fromm Reichmann écrit ainsi en 1949 : « Le schizophrène est terriblement méfiant et plein de ressentiment envers les autres à cause du terrible rejet qu’il a subi de la part de ses proches dans sa petite enfance, surtout de la part de sa mère schizophrénogène » (sic). Trude Tietze exerçait comme Leo Kanner, le découvreur de l’autisme, à l’hôpital Johns Hopkins de Baltimore [lire « Un trouble aux mille visages », p. 25]. Elle publia en 1949, dans la revue Psychiatry, une « Étude des mères de patients schizophréniques ». John Rosen, qui pré...