Publié dans le magazine Books n° 90, juillet/août 2018. Par Peter Gray.
Nous laissons de moins en moins de temps aux enfants pour jouer. En tout cas, plus comme avant : entre eux, à l’extérieur et sans surveillance. Il en résulte des individus angoissés, peu sûrs d’eux et, souvent, socialement inaptes. Car c’est bien en jouant, et non en classe, que l’on apprend à devenir adulte.
Durant notre enfance dans les années 1950, nous avons reçu, mes amis et moi, une double éducation. Nous avons eu l’école et ce que j’appelle une éducation de chasseurs-cueilleurs. Nous étions une petite bande du quartier composée d’enfants d’âges différents, à jouer presque tous les jours, après la classe, souvent jusqu’à la tombée de la nuit. Nous jouions tout le week-end et tout l’été. Nous avions le temps d’explorer, le temps de nous ennuyer et d’imaginer des façons de tromper l’ennui, le temps de faire des bêtises et de trouver le moyen de les réparer, le temps de rêvasser, de nous adonner à nos passions, de lire des bandes dessinées ou n’importe quoi d’autre plutôt que les livres qu’on nous avait donné à lire. Ce que j’ai appris au cours de mon éducation de chasseur-cueilleur a été bien plus précieux pour ma vie d’adulte que ce que j’ai appris à l’école, et je pense que d’autres personnes de mon âge en diraient autant.
Depuis une bonne cinquantaine d’années, les occasions qu’ont les enfants...