Publié dans le magazine Books n° 87, janvier/février 2018.
Les céréales ont joué un rôle central dans l’avènement des États. Sans elles, nous serions peut-être restés des barbares. Mais tellement plus libres.
Cinq mille ans avant notre ère, les humains délaissent la chasse et la cueillette pour vivre de l’agriculture. C’est là « la pire erreur de l’histoire de l’humanité », selon le géographe et biologiste Jared Diamond, et sa « plus grande escroquerie » pour l’historien Yuval Noah Harari. Dans
Against the Grain (1), l’anthropologue américain James C. Scott, professeur à l’université Yale, ne dit pas autre chose. Avec la révolution néolithique, l’homme devient l’esclave du blé et de la société hiérarchisée qu’il a construite à cause de cette céréale. Mais « ce qui fait la nouveauté de son récit, c’est le rôle central et l’estime qu’il accorde aux barbares », souligne l’universitaire Jedediah Purdy dans
New Republic. Scott entend ainsi sortir de la conception binaire de l’histoire léguée par les premières civilisations et rétablir la place des populations qui vivaient hors de la portée des États. Car « la question de savoir comment on vivait en dehors des sociétés étatiques sédentaires est importante pour l’appréciation globale de l’histoire...