Publié dans le magazine Books n° 104, février 2020. Par Stephen Greenblatt.
Même si l’idée de l’enfer lui préexiste, il faut attendre le christianisme pour qu’elle se déploie dans toute son extravagance. Fonction principale : maintenir les hommes dans la crainte, disait déjà Christopher Marlowe. La réalité est plus complexe : l’enfer offre des satisfactions, y compris d’ordre politique.
« Je crois plutôt que l’Enfer est une fable », décrète le célèbre professeur. Un propos surprenant pour la fin du XVI
e siècle, époque où personne ou presque n’aurait osé dire une chose pareille, et de la part de quelqu’un qui est en pleine conversation avec un démon auquel il propose de vendre son âme. Le professeur en question est le docteur Faust, dans la grande tragédie élisabéthaine de Christopher Marlowe. Las de sa maîtrise de la philosophie, de la médecine et du droit, Faust a soif de connaissances occultes. « En quel lieu êtes-vous damnés ? demande-t-il à Méphistophélès, le démon qu’il a fait apparaître. La réponse fuse : « En Enfer. » Faust reste sceptique : « Comment se fait-il que toi, tu sois sorti de l’Enfer ? » La réponse du démon est d’un calme dévastateur : « Mais l’Enfer c’est ici, je n’en suis pas sorti. »
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Marlowe croyait-il vraiment à l’existence de l’enfer, lui qui était un athée notoire et qui déclara (selon un rapport de police) : « La religion...