Publié dans le magazine Books n° 100, septembre 2019. Par William Dalrymple.
Le raisonnement critique n’est pas né qu’en Occident. Convaincu de la nécessité du débat, le souverain moghol Akbar contribua à son essor dans l’Inde du XVIe siècle. Tandis que les Européens envoyaient les hérétiques au bûcher, il organisait des dialogues interreligieux dans son palais.
Fatehpur Sikri est aujourd’hui en ruine. Elle fut la capitale bâtie par l’empereur moghol Akbar dans les environs d’Agra à la fin du XVI
e siècle. Au centre du palais, lui-même situé au centre de la ville, se trouve le
diwan-i-khas, la salle des audiences privées. Et au centre de la pièce se dresse un pilier au chapiteau finement sculpté.
Il est surmonté d’un balcon circulaire d’où partent quatre passerelles qui mènent aux quatre coins de la pièce et sont ornées de quatre chapiteaux plus modestes. Si les spécialistes débattent encore de la fonction de cette étonnante structure, la plupart s’accordent à y voir une sorte de trône pour l’empereur. Assis sur des coussins de soie empilés sur le balcon central, affirmant ainsi son rôle d’
axis mundi, de pilier de l’Empire moghol, Akbar écoutait attentivement les philosophes, les mystiques et les saints hommes de différentes confessions débattre des vertus de leurs conceptions métaphysiques respectives.
Dans le monde occidental, les souverains musulmans sont rarement considérés comme des porte-é...