Éloge des économistes
Publié dans le magazine Books n° 54, mai 2014. Par Herbert Gintis.
Michael Sandel fait erreur sur toute la ligne. Non seulement les incitations financières peuvent se révéler fort utiles quand l’altruisme ne suffit pas à motiver les individus, sans pour autant éliminer toute forme de désintéressement, mais le marché a joué un rôle majeur dans le développement de la morale sociale et de la démocratie.
Michael Sandel commet deux erreurs en plaçant la morale au-dessus du marché.
D’abord, sa critique de la théorie économique est erronée. L’idée que certaines choses précieuses ne doivent pas être achetées et vendues sur le marché est vieille de plusieurs siècles, en tout état de cause depuis le mouvement pour l’abolition de l’esclavage en Angleterre. Tous les économistes majeurs et vaccinés le savent. Ce n’est pas parce qu’un obscur auteur peut gagner son quart d’heure de célébrité en plaidant pour la suppression du cadeau non monétaire qu’il faut y voir un brillant exercice de raisonnement économique (1).
Nous ne disposons pas d’une théorie complète permettant de savoir quand il vaut mieux laisser au marché l’échange de biens de valeur et quand il vaut mieux le réguler par d’autres mécanismes, comme les normes sociales ou...