Publié dans le magazine Books n° 99, juillet/août 2019. Par Caspar Henderson.
Si l’on sait tendre l’oreille, le ceibo amazonien, le peuplier de Virginie, l’olivier de Jérusalem ou même le poirier planté dans le béton new-yorkais ont mille histoires à nous raconter.
Dans
Le Baron perché, le chef-d’œuvre comique d’Italo Calvino publié en 1957, le héros abandonne son quotidien de hobereau du XVIII
e siècle pour vivre dans les branchages des forêts de Ligurie. Avec les années, ses sens s’aiguisent et le rendent de plus en plus réceptif à la vie des bois, jusqu’à percevoir « le travail du bois qui gonfle de ses cellules les cercles marquant les années au cœur des troncs […], le frisson des oiseaux endormis qui blottissent leur tête au plus doux de l’aile, l’éveil de la chenille et l’éclosion de la pie-grièche
1 ».
Au cours d’un trek au cœur de la forêt tropicale du parc national Yasuní, dans l’ouest de l’Équateur, le biologiste David George Haskell entre dans un état semblable. Lorsque la pluie tombe, écrit-il dans les premières pages d’
Écoute l’arbre et la feuille, la diversité botanique se mue en sons :
« En chaque espèce, la pluie résonne différemment […] Les folioles épanouies de la mousse aérienne cliquettent sous l’impact...