Publié dans le magazine Books n° 99, juillet/août 2019. Par George Monbiot.
En Slovénie, au pied des Alpes dinariques, la forêt dense s’étend à perte de vue. Il y a encore un siècle et demi, elle ne couvrait que 30 % du massif. Sa régénération résulte de la longue série de tragédies humaines qu’a connue la région au XXe siècle.
Je regagne la lumière du jour et j’ai du mal à croire ce que je vois ou, plutôt, ce que je ne vois pas. Je fixe du regard les montagnes alentour et je les compare mentalement aux photos anciennes que j’ai vues du même lieu. Là où s’étend à présent une forêt dense aux frondaisons hautes et touffues – dans les vallées, sur les hauteurs, à flanc de coteau, avant de laisser place, vers 1 000 mètres, à des pins qui se raréfient avec l’altitude –, il n’y avait quasiment rien. Sur les photos du sud-est de la Slovénie datant de la Première Guerre mondiale, la terre est quasiment dépourvue d’arbres.
Les arbres sont aujourd’hui si hauts, si impressionnants, ils recouvrent si densément les hauteurs que, lorsque l’on voit les photos anciennes – mais récentes à l’échelle du temps écologique –, on a du mal à penser qu’il s’agit du même endroit. J’ai tellement l’habitude de voir des forêts se dégrader que j’ai l’impression de me passer un film à l’envers.
Tomaž Hartmann a roulé pendant près d’une heure...