Pas de soleil à Versailles
Publié le 30 mai 2017. Par La rédaction de Books.
La décision d’Emmanuel Macron de recevoir Vladimir Poutine à Versailles a été largement commentée et critiquée. Le nouveau président se prendrait-il pour le Roi Soleil ? Difficile à dire, mais pour Gérard Sabatier une chose est sûre, Versailles n’est pas le château du Roi Soleil. Dans Versailles ou la figure du roi, l’historien assure que l’association de ce palais à la mythologie solaire est une supercherie.
Si cette allégorie est bien présente dans les décorations du château, elle n’en constitue ni la figure principale ni même une image innovante. Le symbole du soleil couronné est déjà daté quand le palais est aménagé. D’autres monarchies l’ont déjà utilisé. Et à Versailles même, il est très vite abandonné. Dès 1670, ses configurations et son iconographie représentent Louis XIV non plus tel le soleil, mais sous ses propres traits et dans sa propre histoire.
Il s’agit, selon Gérard Sabatier, d’une nouvelle forme d’allégorie visant à associer un roi seul et parfait à l’Etat. Le portrait du roi est une représentation de la souveraineté elle-même, le symbole d’une puissance perpétuelle et absolue.
Mais ce sens politique que Louis XIV a souhaité donner à son palais est vite perdu. Dès la fin du XVIIe siècle, du vivant même du roi, le décor de Versailles n’est plus admiré que pour ses qualités esthétiques. Les réaménagements incessants du château et la fin d’un certain goût pour l’allégorie rendent le rapport entre les images et la pensée théorique sur la monarchie illisible. Louis XIV fait alors ajouter des commentaires sous certaines fresques, mais ceux-ci sont contreproductifs. Ils insistent sur les références à la mythologie et à l’histoire sans jamais expliquer le contexte politique. Versailles devient un musée dépolitisé ou associé à la bien plus évidente figure du monarque soleil et est resté figé ainsi à travers les siècles.